BIOGRAPHIE COMPLÈTE

Post�e par : Jack'
Ajout/Modification de la Bio
� Combien �tes-vous dans la salle ? Formez des groupes de rock... LIBRES ! �. Ces derniers mots l�ch�s par Fran�ois � la fin de la derni�re nuit noire b�ruri�re, le 11 novembre 1989, r�sonne comme un passage de t�moin entre deux g�n�rations. Deux �poques, deux visions du monde �galement. Car le paysage musical fran�ais est bien diff�rent dix ann�es auparavant. Si la vague punk britannique a su faire quelques �mules de ce c�t�-ci de la Manche (Starshooter et surtout M�tal Urbain), la jeunesse hexagonale pr�f�re encore s�enthousiasmer pour des formations plus consensuels (T�l�phone), laissant aux seuls Trust le soin de cracher r�volte et m�pris sur ces ann�es Giscardiennes. Le climat social est mauvais, le ch�mage augmente, en banlieue les cit�s-dortoirs se transforment en ghettos, et l�on commence d�j� � pointer du doigt les d�lires urbanistes des ann�es 60/70. C�est dans ce climat maussade que Fran�ois et Olaf forment leur premier groupe en 1978 qu�ils baptisent du nom de B�rurier. B�rurier, le c�l�bre bras droit du commissaire San Antonio qui regroupe sous sa crasse tout les maux du beauf� moyen : con, raciste, born�, grande gueule, port� sur le sexe et la bouteille, en bref une caricature � �chelle humaine de ce qu�une soci�t� civilis�e peut engendrer de pire. Une foultitude de d�fauts contrebalanc�e par une faconde intarissable et un humour d�sopilant. Apr�s quelques prestations chaotiques, le quatuor splitte sans surprise en 1980, donnant naissance au B�rurier deuxi�me g�n�ration : Fran�ois au chant, Olaf et Pierrot aux guitares et une Electro-Harmonix D.R.M. 16 baptis�e D�d� en guise d�organe rythmique. Le trio encha�ne � cette �poque les concerts dans les squatts du XIXe et du XXe ainsi qu�en banlieue. Mais si le groupe commence � �toffer un r�pertoire encore bien l�ger, il n�est jamais bien loin d�un chaos fatal. Ainsi, Pierrot gravement accros � l�alcool est envoy� en cure de d�sintoxication, puis sous les drapeaux, avant d��tre intern� en h�pital psychiatrique. En mat�rialisant l�inhumanit� d�un syst�me o� la force et l�ali�nation physique et psychiques font loi, la descente aux enfers de Pierrot va d�s lors stigmatiser nombre des futurs discours B�rur�ens. Pour pallier � cette d�fection forc�e, les deux rescap�s font appel au guitariste de Guernica, Loran, qui devient rapidement la seconde moiti� des B�rus lorsqu�Olaf quitte � son tour le navire en 1982. R�duits � un simple duo, Fran�ois et Loran d�cident de suicider B�rurier lors d�un ultime concert � l�Usine Pali-Kao.

Baptis� pour cette funeste circonstance B�rurier Noir, le groupe surprend son auditoire par un show spontan� et original. Une prestation th��trale au cours de laquelle Fran�ois intronise les c�l�bres d�guisements, masques et autres ustensiles qui deviendront la marque de fabrique du groupe. La performance, ce soir-l�, subjugue un public qui, contre toute attente, en redemande. En ce 19 f�vrier 1983, Pali-Kao signe donc d�une main l�acte de d�c�s de B�rurier tout en saluant de l�autre la naissance des B�rurier Noir. Le nom ne tarde gu�re � faire le tour d�un underground parisien qui se presse aux concerts toujours plus furax du bin�me masqu�. En mars, celui-ci entre au Studio Mesa pour y enregistrer un album dix titres mais juge au final la production bien trop propre. Loran et Fran�ois d�cident n�anmoins de garder quatre d�entre eux, � Nada 1/2/3 �, � La mort au choix �, � B�cherons � et le d�j� tr�s culte � Amput� �, en vue d�un split maxi-45 tour avec Guernica.

Glaciales et oppressantes, soutenues par l�obs�dante bo�te � rythmes et d�chir�es par les riffs simplistes d�une guitare abrasive, les quatre pi�ces de � Nada � sont d�un minimalisme taill� au scalpel qui fait froid dans le dos. Une musique d�ali�n� tout droit sorti d�un bloc op�ratoire dans lequel r�sonne de terrifiants �chos : � ...Torture mentale physique psychose... �... Fort de cette premi�re trace vinylique, le duo continue plus que jamais ses exp�riences live et ses prestations sauvages. Guitare, bo�te � rythmes et amplis � piles, donnent en effet une grande libert� de mouvement au groupe qui se meut de squats en squats, allant m�me jusqu�� jouer � cache-cache avec la RATP dans le m�tro lors de la f�te de la musique 1983. Une v�ritable � Unit� Mobile de la Gu�rilla Urbaine � qui annonce d�j� le � Petit Th��tre de Force � des futures ann�es B�ruri�res. En d�cembre, la paire retourne bri�vement en studio pour y enregistrer � Macadam Massacre �, un premier album dans lequel l�influence de M�tal Urbain se fait plus que pr�sente. Pourtant, la singularit� du son B�rurier appara�t d�ores et d�j� comme �vidente ; largement esquiss� sur � Nada �, leur style neurasth�nique et hypnotique prend sa pleine dimension sur dix titres glauques � souhaits, comptines industrielles parfum�es d��ther, de napalm et de b�ton. Las d�une humanit� barbare et d�un monde o� seule la force fait loi, le duo �gr�ne ses peurs et ses haines (� J�ai peur �, � Fr�res d�armes ! �) jusqu�� arriver au nihilisme le plus total de � Manifeste �. Pour les B�ruriers version 1983, le monde est d�j� une vraie porcherie et les lendemains ne chanteront s�rement pas, si ce n�est un requiem bien m�rit�...

Cette r�alisation � taille r�elle va permettre � un public de plus en plus nombreux et curieux, d�apprivoiser l�alchimie conceptuelle du groupe et son style unique. Un singularisme qui les distingue d�entr�e de la seconde g�n�ration punk, celle du � Punk�s not dead � d�Exploited ou GBH, et qui lance, sans le savoir, les graines d�un � keupon � la fran�aise � qui s�auto-baptisera bient�t � alternatif �. Mais certaines formations ne go�teront pas de leur vivant � ce mouvement bouillonnant de cr�ativit�. Ainsi les frappadingues Lucrate Milk, premiers compagnons d�infortune des B�rus se sabordent en 1984. Un split duquel Fanfan et Loran sauront tirer avantage en int�grant le saxophoniste Masto ainsi qu� Helno, Marsu et Laul, amis de longue date qui se sont progressivement invit�s comme � choristes �, ajoutant une touche bord�lique et festive au performances, jusqu�ici plut�t cliniques, du duo. Mais devant le nombre croissant de squats mur�s par un gouvernement Mauroy qui redoute la prolif�ration de foyers d�extr�me gauche, les B�rus d�cident d�approfondir leur concept d�Unit� Mobile de la Gu�rilla Urbaine en posant leurs amplis l� o� bon leur semble. Ainsi le 29 mars 1984 investissent-ils la fac de Tolbiac pour un concert chamarr�, signant l� le manifeste du � Petit Th��tre de Force � : une comedia dell�arte pour guitare et masques � gaz, une gigantesque pantalonnade o� seules comptent la spontan�it� et l��nergie. Un rock libre et ouvert � ceux qui veulent bien le faire vivre. Le message passe. Ainsi, B�rurier Noir deviennent-ils les deux mots cl�s d�un bouche-�-oreille qui ne se cantonne plus seulement � Paris et sa banlieue mais qui touche la province et m�me l��tranger ! Bordeaux, Poitiers, Bruxelles ou Dublin, la tra�n�e de poudre b�ruri�re se propage � travers la France et au-del�, entra�nant entre deux spectacles sauvages son lot de gal�res et d�impromptus. Mais ces diff�rentes campagnes extra-parisiennes permettent aussi au groupe de jauger sa popularit� grandissante aupr�s d�un nouveau public qui se reconna�t dans les messages et les attitudes v�hicul�s par la troupe.

Fid�les � leurs principes d�unit� et d�entraide, les B�rus se retrouvent �galement au centre d�une flop�e de jeunes formations avec lesquelles ils n�h�sitent pas � partager les nombreuses � sc�nes � qui leur sont propos�es. Ainsi les Ludwig Von 88, Ausweis et autres Souris D�glingu�e accoleront-ils souvent leur nom sur les af
iches de concerts des BxN. Forts des nouvelles forces vives qui composent � pr�sent la � n�buleuse B�rurier Noir � (deux jeunes Tourangelles, les Titis, font office depuis peu de danseuses-choristes), le groupe rentre en studio d�but 85 pour y enregistrer son second opus � Concerto Pour D�traqu�s �. Oubli� les rythmes mid-tempos d�il y a peu et le � no future � en clair-obscur de � Macadam Massacre � ; l�ouverture du concerto se fait ici sur la cadence fr�n�tique d�un � Petit agit� � qui d�gage la voie � une ribambelle d�hymnes � l�insoumission et � la libert�. � Vivre libre ou mourir �, � Conte cruel de la jeunesse �, � Le renard �, � H�l�ne et le sang �, � Porcherie �... les titres parlent pour eux-m�me, fustigeant tour � tour la parano�a s�curitaire, les camisoles chimiques, le viol ou l�extr�me droite. Un r�cital � trois accords d�di� � une France d�traqu�e dont une partie pleure d�j� sur les illusions perdues de 1981... Mais tout n�est pas noir dans cet album. Renforc� par une armada de choristes (apparition des fameux refrains o� !) et par le sax de Paskal Kung-Fou, la troupe parvient � retranscrire l�aspect festif et chahuteur de leurs concerts, faisant de � Concerto... � une v�ritable piste aux �toiles o� s�entrechoquent �nergie grima�ante et r�bellion clownesque ! � mi-chemin entre Barnum et � Orange M�canique �, les B�rus affinent une imagerie unique et s�duisante, largement relay�e par les dessins de Laul qui devient le � graphiste � officiel de la ra�a masqu�e. Marsu, qui s�est petit � petit impos� comme le manager naturel du groupe, cr�e quant � lui son propre label : Bondage. Un accord tacite est sign� entre le label et le groupe, qui sort donc � Concerto Pour D�traqu�s � courant 1985 dans la plus totale ind�pendance, continuant ainsi dans la voie qu�il s�est toujours impos� de suivre. L�ann�e 1985 voit donc s�organiser quelque peu le grand � macadam circus � qu�est en train de devenir B�rurier Noir : la troupe garde un contr�le total sur son image, sa propagande, le prix des billets et va m�me jusqu�� cr�er son propre service d�ordre. Une organisation auto-g�r�e, par�e pour affronter les sir�nes du show-biz qui commencent � reluquer du c�t� de ces � petits agit�s �. Les B�rus multiplient par ailleurs les concerts de soutien, n�h�sitant pas � traverser l�hexagone pour aller manifester leur bruyante solidarit� avec les ch�meurs ou le SCALP. En novembre, le petit cirque enregistre le EP � Joyeux Merdier �. Un bordel bariol� d�humour noir qui r�v�le deux nouveaux immenses chants de ralliement : l�incendiaire � Vive le feu � et l�hymne � Salut � toi � qui deviennent d�s lors d�incontournables classiques. Mais il faut attendre fin 1986 et le 45 tours � L�Empereur Tomato-Ketchup � avant de retrouver trace du groupe sur disque. Une ann�e pendant laquelle le � troupeau d�rock � sillonne France, Belgique et Suisse, avec en point d�orgue leur premiers � gros concerts � � la Mutualit�, � l�Elys�e-Montmartres et aux Transmusicales de Rennes. Trois �v�nements d�importance que la presse ne peut plus ignorer. Actuel, Best ou NRJ s�emparent du � ph�nom�ne �, marchant ainsi sur les plates-bandes des fanzines, radios libres et autres organismes alternatifs dont certains n�h�sitent d�j� pas � crier � la r�cup�ration. Qu�importe, malgr� le poids et l�influence des m�dias, la troupe garde la t�te froide et reste solidement accroch�e � ses id�aux d�ind�pendance.

Mais cet int�r�t soudain ne se fait pas sans douleur ni trouble au sein m�me du gang. Pression m�diatique mais �galement gal�res de tourn�es et arnaques fragilisent l�osmose du groupe et attisent les sensibilit�s. Pour couper court � cette situation qui ne demande qu�� empirer, les B�rus d�cident de se retirer pendant quelques semaines et mettent ce break � profit pour enregistrer leur troisi�me album. � Abracadaboum � d�crit bien dans son titre la teneur de ces dix nouvelles bombinettes concoct�es par Loran et Fran�ois. Toujours plus loufoque et cynique, le rock fac�tieux de la ra�a continue de crier victoire et d�invoquer la r�bellion, qu�elle soit d�ici (� Nuit Apache �) ou d�ailleurs (� Casse-T�te Chinois �). Aussi color�e qu��nerv�e, la troupe b�ruri�re fait un boucan d�enfer, transformant chaque titre en gag contestataire, chaque refrain en hymne de rue, chaque cadence en pogo ! La fascination de Fran�ois pour l�Extr�me-Orient prend par ailleurs ici sa pleine dimension, ajoutant un peu de folklore � cet � Abracadaboum � unanimement acclam� � sa sortie en juin 1987. L�ann�e 1988 d�bute sous les meilleurs auspices avec une date l�gendaire au Z�nith de Paris qui ouvre la porte sur une multitude de concerts, dont une triomphale tourn�e au Qu�bec. C�t� studio, la bande trouve le temps d�enregistrer le maxi � Ils veulent nous tuer �, le 45 tours � Vi�tnam Laos Cambodge � (r�alis� au profit de l�association Sampan qui soutient les r�fugi�s du Sud-Est asiatique) et le split 45 tours � Mackhnovtchina � avec Haine Brigade. Une ann�e donc tr�s prolifique mais qui s�ach�ve sur le d�part d�Helno, parti se consacrer aux N�gresses Vertes et sur un premier clash avec Bondage. Les relations entre le groupe et son label ne cesseront d�s lors de se d�t�riorer, � l�image d�un mouvement alternatif qui vit ses derni�res heures d�ind�pendance. La seconde g�n�ration emmen�e par la Mano Negra ou Les Satellites ne tarde gu�re � succomber � l�appel des majors. Pour Loran et Fran�ois, c�en est trop ! � Vivre Libre ou Mourir � n��tait pas une phrase en l�air, les B�rus le prouvent en programmant leur s�paration pour la fin 1989. N�anmoins, le groupe maintient l�enregistrement de son quatri�me album, � Souvent Fauch� Toujours Marteau �. R�alis� par Eric D�bris de M�tal Urbain et mix� par Franz Treichler des Young Gods, cet opus r�v�le une production surprenante de puissance et de limpidit� qui dynamise les nouveaux morceaux de bravoure que sont � 2 clowns �, � Camouflage � ou � Protesta �. Malgr� quelques relents � Abracadaboumesques � (� Clockwork B�ru �), le ton des compositions n�est plus au fun. Les derniers troubles rencontr� par le groupe et ce split annonc� apparaissent en filigrane derri�re des titres parfois tr�s noirs (� Carnet de route �, � Soleil noir �). Une nouvelle fois, le public acclame le disque � sa sortie en octobre 1989. Mais les B�ruriers ont d�j� la t�te ailleurs, partis sur la route pour une tourn�e d�adieux de douze dates qui les emm�ne en Suisse et au Qu�bec avant un seppuku historique � l�Olympia les 9, 10 et 11 novembre.

Ce suicide en forme de carnaval marque le dernier grand fait d�armes de l�armada qui offre � son public trois soir�e d�intense folie, encha�nant ses plus grands hymnes sous un d�luge de slogans vengeurs (� La jeunesse emmerde le Front National ! �), de d�guisements, de danse et d�happenings en tout genre. Un testament qui sortira en double vinyle un an plus tard sous le nom de code � Viva Bertaga � (une vid�o sera �galement commercialis�e) et qui constitue encore � ce jour l�une des pi�ces les plus incontournables du rock fran�ais. D�gag� de ses obligations b�ruri�re, Fran�ois s�en va former Molodo� tandis que Loran replonge dans l�underground avec, entre autre Tromatism, laissant le fant�me de B�rurier Noir s�installer durablement dans la m�moire collective de nouvelles g�n�rations pour qui B�rurier rime d�sormais avec Libert�. Silencieux tout au long des ann�es 90, le duo profite de la sortie d�un double DVD, � M�me Pas Mort �, pour refaire parler de lui en 2003 en se reformant bri�vement le temps d�un concert cataclysmique aux Transmusicales de Rennes. � ce jour, personne ne sait encore quel sera l�avenir du groupe...